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Fin de la DLUquater : vite, il est temps de sortir du bois
Mes Laura De Sabato et Jean-Luc Wuidard, avocats du barreau de Liège-Huy
Jusqu’au 31 décembre 2023, la DLUquater («Déclaration Libératoire Unique») offre un cadre légal aux contribuables détenant des avoirs ou capitaux non déclarés (comme par exemple des comptes bancaires étrangers, des contrats d’assurance-vie logés auprès de compagnies étrangères ou encore des revenus imposables logés au sein de «constructions juridiques») leur permettant de bénéficier d’une amnistie fiscale, mais aussi pénale, en déclarant spontanément ceux-ci à l’administration fiscale, le tout moyennant le paiement de l’impôt jusque-là éludé, ainsi que le paiement d’une (coûteuse) pénalité.
Bien que de nombreux contribuables concernés ont déjà procédé à une démarche de régularisation, il semblerait qu’il reste encore quelques personnes qui n’ont pas encore franchi ce cap…
Pourquoi procéder à une régularisation de tels avoirs ?
Depuis quelques années, l’administration fiscale belge obtient de manière systématique la plupart des informations touchant le patrimoine mondial de tous les contribuables résidents belges, en raison notamment des nombreuses données échangées avec les administrations fiscales étrangères.
Au fil du temps, il est donc clairement devenu illusoire de croire qu’il serait encore possible, même pour ceux qui se considèrent comme des «petits poissons», de «passer entre les mailles du filet», quand bien même les montants concernés seraient considérés comme relativement limités.
De leur côté, les organismes financiers belges et européens (banques et assurances), devenus très prudents voire «paranoïaques» quant aux risques éventuels auxquels ils sont exposés, sont intransigeants en ce qui concerne la justification de l’origine des fonds détenus par leurs clients.
Ainsi, ces derniers procèdent quotidiennement à des refus de perception ou à des blocages de fonds dont l’origine est jugée nébuleuse ou incertaine et exigent avant d’intervenir la production par le contribuable concerné d’une attestation de régularisation fiscale ; ceci a pour conséquence d’empêcher pendant ce temps tout rapatriement de ces sommes ou tout prélèvement sur celles-ci.
En outre, il faut rappeler qu’ils ont l’obligation (à l’instar de différentes autres professions) de signaler les mouvements qualifiés de suspects à la Cellule de traitement des informations financières (CTIF), dont le rôle est d’enquêter sur ces types de situations et, le cas échéant, de les transmettre au Ministère Public pour d’éventuelles poursuites pénales. Et ce, même si, sur le plan fiscal, les infractions purement fiscales concernées ont été commises il y a de très nombreuses années et sont couvertes par l’écoulement des délais de prescription.
Bien que souvent coûteux puisque la pénalité fiscale s’élève à 40 % des capitaux fiscalement prescrits, l’un des moyens les plus efficaces permettant d’échapper à ces inconvénients majeurs est de procéder à la DLUquater (si toutefois les circonstances le justifient); il faut savoir que cette législation permet d’obtenir une amnistie pénale et par conséquent, de se ménager une réelle possibilité de disposer de la collaboration des organismes financiers pour recevoir, gérer et disposer des avoirs concernés.
Le temps presse…
Pour ce qui concerne les impôts fédéraux, la possibilité de procéder à une DLUquater prendra fin le 31 décembre 2023, alors qu’elle a d’ores et déjà pris fin le 31 décembre 2020 pour ce qui concerne les impôts régionaux (droits de succession ou droits d’enregistrement).
A partir du 1er janvier 2024, comme c’est actuellement le cas pour les impôts régionaux, il sera en principe encore concevable de déclarer spontanément les avoirs non déclarés au fisc, mais cela ne pourra plus se faire dans un cadre légal, ni avec l’octroi d’une amnistie pénale...
Par conséquent, la régularisation des sommes imposables à un impôt fédéral ne pourra plus se faire que dans l’incertitude et sans aucune garantie d’immunité pénale, ce qui rendra les fonds suspects quasiment inutilisables en pratique.
Nous ne pouvons que conseiller aux derniers contribuables résidents belges détenant encore des avoirs non déclarés et non encore régularisés de faire procéder sans tarder à une analyse concrète de leur situation afin d’évaluer l’opportunité de procéder (ou non) à une DLUquater. A défaut, la possibilité d’un jour pouvoir disposer de tout ou partie des avoirs en question sera plus que compromise...