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Eloge des avocats du ressort de la Cour d’appel de Liège décédés pendant l’année judiciaire 2012-2013
Discours
Monsieur le Premier Président de la Cour d’appel,
Monsieur le Premier Président de la Cour du travail,
Monsieur le Procureur Général,
Mesdames et Messieurs les Présidents,
Mesdames et Messieurs les Conseillers,
Mesdames et Messieurs les Avocats généraux et Substituts du Procureur Général,
Mesdames et Messieurs,
Mes chers Confrères,
Il est de tradition que la Cour associe le barreau à l’hommage que le monde judiciaire rend à ses défunts, et je tiens à l’en remercier particulièrement.
La cérémonie qui nous unit aujourd’hui est de la plus haute importance, pour le barreau bien sûr, et bien plus encore sans doute pour les proches et les amis de ceux qui nous ont quittés.
La disparition d’un être cher est naturellement insupportable. Chaque fois, elle nous ramène à notre propre finitude, à l’intimité de notre chagrin où les mots ont peu de poids, dans l’emprise douloureuse de notre solitude.
La blessure du départ ne se referme jamais. Elle se borne à devenir tolérable avec le temps, avec le soutien des proches, avec la solidarité sociale et notamment celle de la communauté professionnelle.
Puisse l’ombre de la tristesse être couverte par la lumière des souvenirs, des moments de joie, d’amour, d’amitié et de fraternité qu’ils nous ont donnés.
Telle est l’humble ambition de cette cérémonie qui réunit aujourd’hui les membres de la communauté judiciaire du ressort de la cour d’appel de Liège.
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Mesdames, Messieurs, Les barreaux d’Arlon, Eupen, Marche en Famenne, Neufchâteau et Verviers n’ont pleuré la perte d’aucun des leurs au cours de l’année écoulée. Le barreau de Namur, de Huy et de Dinant ont pleuré l’un des leurs, et celui de Liège en a pleuré huit.*
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Le 4 septembre 2012, Maître Henri GODIN nous a quittés. Né à Herstal le 3 février 1930, il prêta le serment d’avocat sous l’égide de Maître Henri Maisse le 16 septembre 1952 et fut admis au stage à la même date. Maître Henri Godin fut inscrit au Tableau le 27 novembre 1956, et à la Liste des avocats honoraires le 30 juin 2004. Il a été membre du conseil de l’Ordre, pour les années judiciaires 68-69, 69-70, 73-74, 74-75, 78-79, 79-80, 94-95 et 95-96, soit à huit reprises. Au 16ème siècle et au début du 17ème, Herstal était une seigneurie libre. Le seigneur d’Herstal avait un droit de haute et de basse justice. Maître Henri Godin, par sa stature locale était dans la lignée de cette histoire seigneuriale, ancré dans un terroir où l’industrie se dispute à la ruralité. Avocat de proximité, il voulut rester au plus proche des justiciables, mais aussi au plus proche de lui-même, travaillant seul avec quelques collaborateurs sans jamais s’associer. Ce que j’appelle le seigneur d’Herstal fut élu aussi pape – pape du divorce – lorsqu’une page entière du journal La Meuse consacra sa spécialité dans le domaine du droit. En raison de cette autorité naturelle fondée sur le respect et l’amitié, Maître Henri Godin était également appelé familièrement le bâtonnier de Herstal. Nombreux sont ceux qui le destinaient à la fonction du bâtonnier de l’Ordre des avocats du barreau de Liège, et il fut approché. Par excès de modestie, il déclina l’offre qui lui paraissait impossible compte tenu de la charge solitaire de son cabinet. A Herstal aussi, il fut juge suppléant à la Justice de paix : sa Justice de paix. C’était une fonction et une destinée naturelle pour cet homme. Il en eut la charge avec Maître José Cloes durant plus d’un an dans l’attente de la désignation d’un nouveau magistrat en la personne de Madame le Juge Christiane Capitaine. Seigneur de Herstal, pape du divorce, bâtonnier de Herstal, juge suppléant mais n’oublions pas le titre qui pour lui dépassait, passionnément, tous les autres, celui de Président. Président pendant 40 ans de son club de football, l’ASH, l’association sportive herstalienne, il ne ratait aucun match, s’arrangeant pour que les vacances familiales coïncident avec la trêve footballistique. Cet homme était donc enraciné là où il a vécu, travaillé et aimé. Tandis que son fils Serge a fait carrière dans l’informatique, son œuvre de justice se poursuit avec son fils Philippe, avocat, et sa belle-fille, Sabine, magistrat. La succession de la seigneurie d’Herstal est donc assurée.*
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Maître Philippe EVRARD, nous a quittés le 14 septembre 2012. Né à Tihange le 7 septembre 1938, il prêta le serment d’avocat sous l’égide de Maître Lange le 26 novembre 1963 et fut admis au stage le 28 novembre 1963. Maître Philippe Evrard fut inscrit au Tableau le 18 juin 1968. Un autre seigneur du barreau nous a quittés. Maître Philippe Evrard était un homme d’élégance déjà par son allure toute british. Il avait pour la langue anglaise et sa culture une passion particulière qui lui faisait préférer la langue de Shakespeare au français pour l’écriture de ses nouvelles. L’élégance de l’esprit aussi pour cet homme que rien ne semblait atteindre tant son flegme naturel lui permettait de ramener à la sérénité les craintes de ses clients et les passions agitées au dérisoire. Ce gentleman de Waremme se distinguait par sa loyauté, son intégrité, son humour, sa culture et son sens personnel de la lenteur. L’humour comme en atteste son étymologie est d’origine anglaise. L’humour de Maître Philippe Evrard était un humour humaniste dépourvu d’influence de classe, un humour pudique, jamais railleur, toujours fédérateur. Tout était ou devenait relatif pour cet homme calme et posé qui traversait le temps sans jamais perdre le sens de l’équilibre. Cette distance avec le vacarme des temps modernes donnait à Maître Philippe Evrard cette précieuse indépendance que recherche tant le justiciable dans toute sa diversité et qui prenait avec fidélité le chemin de la rue Renier pour venir prendre le conseil avisé de l’homme de sagesse, pour confier leur défense à l’avocat de talent dont la culture juridique était variée et étendue. Maître Philippe Evrard n’a pas immédiatement compris qu’il n’était pas immortel et avec le sens du dérisoire qui le caractérisait, il a enseigné à ses enfants et petits-enfants qu’en définitive, ce n’était pas dramatique. Maître Philippe Evrard était certes un Hesbignon de racine, mais aussi un homme universel par sa culture, tourné vers la philosophie, la foi, les sciences, la musique et la lecture du Times. Cet homme encré dans son terroir a donné le goût du droit à sa fille Laurence. Sir Philippe Evrard, seigneur de Waremme, a assuré sa succession.*
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Le 18 septembre 2012, Maître Eric MARTELLO, nous quittait. Il était né à Liège le 21 décembre 1961. Docteur en droit de l’Université de Liège le 10 octobre 1986, il prêta le serment d’avocat le 16 décembre 1986, sous le patronage de Maître Jean-Marie Discry, et fut admis au stage le 2 janvier 1987, puis inscrit au Tableau le 28 avril 1992. Il fut admis à l’honorariat à sa demande le 30 avril 1997. Son patron de stage, Maître Jean-Marie Discry, garde le souvenir d’un stagiaire sérieux, érudit, idéaliste et apportant une assistance aux plus démunis avec un dévouement et un désintéressement au sens le plus noble du terme. Maître Eric Martello a marqué sa vie par le sceau de la volonté de la découverte du genre humain. Ce voyageur a parcouru le monde et ses cultures, des neiges du Kilimanjaro au Taj-Mahal, en passant par Petra en Jordanie, la culture maya au Guatemala. Il était un livre de géographie. Il connaissait les quatre coins de la planète dont il avait découvert les limites tout en sachant que celles-ci donnaient à voir de nouveaux horizons. Sportif accompli dans de nombreuses disciplines, il était resté fidèle à la plongée qu’il avait découverte après un séjour à Hurghada au bord de la mer rouge. Cet homme aux multiples facettes avait le sport comme valeur. Le sport nous permet de découvrir cette autre terre inconnue, nous-même, et d’y voyager, de la fertiliser par le dépassement de soi pour être meilleur pour les autres, moralement et physiquement, au service de la vie. Le sport est l’école de sa générosité. Cet homme méticuleux et déterminé a poursuivi une vie militaire jusqu’à obtenir une deuxième étoile de lieutenant. Rien ne se faisait à moitié, Maître Eric Martello détestait l’à-peu-près et le dilettantisme. L’amitié était sa fabrique à lien social, privé et professionnel, d’abord comme avocat pendant une décennie, puis il fut actif dans la gestion privée d’immeubles et, enfin, aux classes moyennes où il dispensa des conseils dans le département de la création et de la transmission d’entreprises. Cet homme de talent était aussi un artiste tourné vers les arts de la scène, l’écriture et la musique. Il a marqué le théâtre Proscenium de la joie d’être sur scène en jouant des personnages multiples et de tous les genres. Avec cet abondance de cœur et de générosité, cet homme a donné de la grâce à son talent. Le combat de sa fin de vie fut mené avec le même courage, la même force de caractère, la même détermination. Entouré de ses amis et de ses proches, avec le sentiment partagé par eux d’une vie riche et accomplie, il a décidé de traverser le miroir la tête haute et dignement pour ne laisser de lui que le charme, la séduction, le rire et la légèreté. Sa vie était lumière et nombreux sont ceux qu’elle éclaire encore aujourd’hui.*
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Maître Jean VIATOUR est décédé le 5 octobre 2012 à l’âge de 94 ans. Né à Forêt le 24 avril 1918, il fut fait docteur en droit le 19 juillet 1941 à l’Université de Liège, puis il prêta, le 18 septembre 1941 sous le patronage de Maître Haversin de Lexhy, le serment d’avocat. Il fut admis au stage le 7 octobre 1941, puis au Tableau le 7 novembre 1944. Il obtient sa licence en notariat le 25 juillet 1942. Il a été décoré de la médaille du volontaire de guerre 40-45 et de la médaille commémorative 40-45. Après sa longue et brillante carrière de magistrat, Maître Jean Viatour est resté lié au barreau par l’honorariat auquel il accéda à sa demande le 8 janvier 1957. Il fut Président émérite à la cour d’Appel de Liège et a donc laissé des traces dans la mémoire de ce palais en sa qualité de magistrat. Nous pointons dans ce long et riche trajet sa mission au Congo belge en mai-juin 1960, dans laquelle il s’est impliqué avec un esprit d’aventure, propre à ce volontaire de guerre, mais aussi avec passion et sens du devoir. Il lia à cette occasion des liens d’amitié avec un infirmier congolais qui remplissait les rôles d’accompagnant ou d’assesseur. Celui-ci rallia Liège pour y poursuivre des études de médecin à l’Université, et l’un de ses enfants a eu pour marraine l’épouse de Jean Viatour, Evelyne, dont Maître Viatour surmonta la disparition en juin 1991 avec courage grâce aux nombreux soutiens de son entourage qui lui rendait son sens précieux de l’amitié. Il y a aussi sa période de juge d’instruction, de président de nombreuses cours d’assises à Liège et à Namur. Ses contemporains, ses petits-neveux et petites nièces ont été nourris pendant près de 40 ans par les récits de ce conteur d’épopées criminelles qui permettait de donner à ces tragédies humaines des allures de romans policiers. Que ce soit comme magistrat ou dans la vie privée, Jean Viatour se caractérisait par une écoute attentive de chacun et il était, dans ses rapports avec les autres, d’une grande simplicité. Il adorait les enfants et prêtait à tous, quel que soit leur âge, une oreille attentive. Ceux qui l’ont connu comme magistrat se souviennent de ce regard sévère de président de la chambre de la cour d’appel en matière pénale, mais en même temps ce regard bienveillant et attentif aux plaideurs. Monsieur Jean Viatour avait un grand sens didactique et le souci constant de transmettre son savoir aux générations suivantes. L’hommage des collaborateurs des code Larcier, hommage dédié « à leur mentor » résume parfaitement, à lui seul, toute sa vie professionnelle. Monsieur Jean Viatour a marqué de son sceau personnel l’histoire de ce barreau et celle de la magistrature liégeoise.*
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Le 15 mars 2013, Maître Benoît HERBIET nous quittait. Il était né le 15 avril 1966. Suivant les traces fécondes de son père, Maître Jacques Herbiet, il prêta le serment d’avocat le 17 septembre 1991, sous le patronat de Maître Dominique Drion, et il fut inscrit à la Liste des stagiaires le 1er octobre 1991 puis au Tableau de l’Ordre le 7 mai 1996. C’est durant son stage, qu’il fut élu à la fonction de secrétaire de la Conférence Libre du Jeune Barreau au mois de juin 1995. Le président en était son associé d’aujourd’hui, Maître Jean-Luc Paquot et le vice-président en était Monsieur le bâtonnier Eric Lemmens. Que cela soit dans la sphère privée ou professionnelle, tous ceux qui ont côtoyé Maître Benoît Herbiet ont conservé de lui le souvenir de l’homme loyal, généreux et perfectionniste. Maître Benoît Herbiet faisait l’unanimité dans le monde judiciaire, tant était forte sa volonté de faire montre dans chaque dossier d’une loyauté, d’une probité et d’une diligence irréprochable quels qu’en soient les enjeux. En particulier, Maître Benoît Herbiet était engagé avec un rare dévouement et une particulière humanité à rendre à chacun de ses administrés, pour le bien de notre société, notre part commune et inaliénable de dignité. Maître Benoît Herbiet était un homme sincère et entier dans toutes ses convictions, attentif et curieux à celles qu’il ne partageait pas. On me rapporte que cet homme déterminé s’était résolu à ne plus fumer et qu’il y était parvenu, notamment par la pratique du sport, et son perfectionnisme insatiable, lui avait permis de retrouver sa ligne de jeune homme. Nous avons été saisis par sa disparition comme par un vertige. Il faut accepter et témoigner auprès de ses enfants Estelle et Arnaud, auprès de ses parents qu’il respectait tant, et auprès de sa compagne, Anne, de son intégrité, de ses traits de bonté, de gentillesse et de perfectionnisme qu’il nous laisse en héritage. C’est non seulement le barreau mais tout le monde judiciaire qui vous témoignent affectueusement leur solidarité.*
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Maître Hélène GILLET-NICOLAS est décédée le 30 avril 2013. Née à Bouillon le 3 juin 1951, elle obtient son diplôme de licenciée en droit de l’Université de Liège le 14 juillet 1974. Elle a prêté le serment d’avocat le 5 mars 1975 sous le patronage de Maître Georges Delnoz. Inscrite à la Liste des stagiaires le 11 mars 1975, elle fut inscrite au Tableau de l’Ordre le 30 avril 1987. Elle fut omise à sa demande le 26 août 1987 et inscrite à l’honorariat à la même date. Comme toute ardennaise, Maître Hélène Gillet avait un caractère bien trempé et était particulièrement têtue. Il fallait ce caractère pour dompter l’homme de sa vie, Marc, qualifié d’ «ours mal léché ». Cependant, il nous a été rapporté que sa manière de conduire un véhicule automobile était - comment dire ? - « aléatoire » et témoignait de son manque de confiance qu’elle transcendait par sa générosité naturelle. Maître Hèlène Gilllet-Nicolas a mené une carrière de magistrat au tribunal de commerce qui la conduira jusqu’à l’honorariat. Avocat honoraire, elle le restera également. Les deux fonctions, avocat et magistrat, furent exercées avec la même courtoisie, la même gentillesse, et pour tout dire, la même bonhomie. Avec elle, la justice ne devait pas descendre de son piédestal, elle n’y était jamais montée et la justice était rendue, bien rendue, avec méticulosité, humilité et bienveillance. C’était un honneur de venir plaider devant ce magistrat car c’était un bonheur d’être accueilli par un sourire et un mot gentil. Cet accueil, cette générosité, cette jovialité, son sens de l’amitié, traits de son unique personnalité, seront irremplaçables.*
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Le 17 mai 2013, Madame la Doyenne Odette MINET nous quittait. Née à Sart-les-Spa le 26 décembre 1927, elle obtient son diplôme de licenciée en droit de l’Université de Liège le 21 juin 1951. Elle a prêté le serment d’avocat le 2 octobre 1951 sous le patronage de Maître Henri Billon. Inscrite à la Liste des stagiaires le 16 octobre 1951, elle fut inscrite au Tableau de l’Ordre le 29 juin 1959. Odette Minet était une intellectuelle pour qui un problème n’était jamais simple. Son cursus universitaire fut impressionnant : elle prolongea son diplôme en droit d’une licence en notariat en septembre 1951 et en sciences économiques appliquées en octobre 1953. Le dernier oral fut assorti d’une offre d’emploi à la banque nationale, aussitôt déclinée pour incompatibilité avec une vie de famille. Monsieur le Bâtonnier Henri Billon recrutait ses stagiaires par le canal du Professeur Léon Graulich et Mademoiselle Minet fut son premier choix. Depuis septembre 1951 jusqu’en octobre 1953, elle cumulait donc études et stages. La formation de l’époque par ce prestigieux bâtonnier était pour le moins particulière. Son patron de stage ne lui révélait pas d’emblée quelle partie il défendait les intérêts. Ce n’est qu’après que sa stagiaire ait défendu la thèse des deux parties que ce prestigieux avocat lui révélait le nom du client et il faisait le reste, au terme de la subtilité de sa dialectique, appliquée à l’analyse de son stagiaire. Maître Minet voua une admiration sans borne au bâtonnier Henri Billon. Maître Minet réunissait en une seule quatre vies de femme menées de front : celle d’avocat, de mère de famille, de maîtresse de maison et celle d’épouse d’un éminent et prestigieux magistrat. Elle fut mère de six enfants dont l’un deux, faux jumeau, ne vécut qu’un mois mais resta présent à jamais dans son esprit. Vivant dans l’ombre de la carrière de son époux, elle s’est résolue, non sans effort, à s’effacer pour éviter toute apparence de conflit d’intérêts. Le quotidien était rythmé par l’éducation des enfants et l’événement sacré du dîner de midi. Le refuge de la rue de Chestret bourdonnait comme une ruche, comme une zone tribale, envahie par les enfants et leurs amis, à tous les âges de leur vie. Elle recevait ses clients pendant que ses enfants étaient à l’école et Maître Odette Minet travaillait la nuit. Désintéressée, elle s’est consacrée à la défense des démunis dans le cadre du pro deo pendant un demi-siècle. A-t-elle su un jour réclamer la juste rétribution de ses prestations à un client ? Maître Odette Minet a eu la chance d’être onze fois grand-mère et une fois arrière-grand-mère, ayant connu son arrière-petite-fille, née en mai 2013. Maître Odette Minet a transmis ses yeux bleus qui pétillaient à sa fille Joëlle, notre consœur. L’œuvre de justice de Maître Odette Minet se poursuit donc par celle-ci, par son fils Paul qui est magistrat, et par Michel qui allie médecine et droit dans le domaine de l’expertise.*
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Maître André LIEVENS est décédé en Angleterre le 24 août 2013. Né à Andenne le 24 juillet 1950, il obtient son diplôme de licencié en droit de l’Université de Liège le 9 octobre 1973. Il a prêté le serment d’avocat le 20 novembre 1973 sous le patronage de Maître Maximilien Hoge et de Maître Théo Biar. Inscrit à la Liste des stagiaires le 27 novembre 1973, il fut inscrit au Tableau de l’Ordre le 18 juillet 1977. Il fut omis à sa demande le 29 décembre 1988 et inscrit à l’honorariat le 10 janvier 1989. Maître André Lievens collaborera avec Maître André Lamalle quelques années et à partir de 1981, avec Maître Georges Dehousse où il va rencontrer Maître Louisa Spadazzi avec qui il va tisser des liens professionnels jusqu’à son accession à la magistrature, ainsi que des liens personnels définitifs. Maître André Lievens était un fanatique de modélisme, de la mécanique, des belles voitures fougueuses et sportives. Il s’était impliqué dans l’organisation de courses automobiles prestigieuses. C’était donc un spécialiste du « roulage ». Maître André Lievens tenait à sa qualité d’avocat honoraire. Il a maintenu un lien étroit avec le barreau, quelle que fut sa fonction avocat ou magistrat. L’homme resta le même : serein, calme et posé. Ses qualités d’accueil ont fait merveille lorsqu’il a assumé la lourde tâche de présider la première chambre d’introduction des affaires civiles devant le tribunal de première instance de Liège. Il réservait toujours un accueil chaleureux aux plaideurs, bienveillant ou compatissant, jamais un mot trop haut, tout au plus un brin d’ironie surréaliste qui faisait son charme. Sa proximité avec le justiciable et son écoute faisaient en sorte que ses décisions étaient comprises et acceptées. C’est donc tout naturellement qu’il devient juge de paix. Cette fonction était pour lui un costume sur mesure. A son audience et dans ses décisions coexistaient le bon sens, le juste et l’équitable ainsi que les règles de droit. Maître André Lievens adorait les voyages et ce n’est pas un hasard s’il fut foudroyé entre l’Ecosse et l’Angleterre. Cet homme de bien était un mari et un père aimant et un grand-père comblé avec ses deux petites filles. Lorsque je lui ai rendu hommage le jour de ses funérailles, ses proches ont insisté pour que je n’oublie pas de le prénommer « boubou ». De ce surnom, jaillit en une sonorité bienveillante toute son humanité.*
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Maître Jean-Marie SEINLET, inscrit au barreau de Huy, est décédé le 31 juillet 2013. Né en 1946 à Seraing, il a été admis à la liste des stagiaires du barreau de Huy le 7 septembre 1971 sous le patronage de Monsieur le Bâtonnier Renaud Destexhe dont il a été du reste le tout premier stagiaire. Maître Seinlet était un excellent juriste et un fin procédurier. Ce confrère ne se laissait distraire ni par les flatteries ni par l’hypocrisie. Il présentait un caractère bien trempé qui laissait des traces redoutées dans ses écrits, à la Barre et des éclats de voix qui éclaboussaient les murs du Palais de Justice. Maître Jean-Marie Seinlet a aussi été durant plusieurs années juge de paix au second canton de Huy. Le bon vivant qu’il était adorait cuisiner, surtout le dimanche pour sa famille, son épouse, ses enfants, beaux-enfants et petits-enfants. Il m’est également rapporté que l’homme de roc pouvait devenir sable, et sans voix, lorsque sa petite fille lui répondait qu’elle n’avait que deux mains, raison pour laquelle elle ne transportait qu’un couvert à la fois pour le ranger. Le barreau de Huy a perdu l’une de ses plus fortes personnalités après qu’il ait lutté contre la maladie pendant plusieurs mois. Son œuvre de justice se poursuit par sa fille, Maître Sophie Seinlet dont il était devenu à l’âge de la pension le collaborateur.*
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Maître Pierre BROUWEZ, avocat honoraire au barreau de Dinant, puis Juge de Police honoraire au barreau de Dinant, nous a également quittés. Maître Pierre Brouwez restait attaché au barreau de Dinant et il était le seul avocat honoraire à participer à toutes les assemblées générales de l’Ordre. Maître Pierre Brouwez fut d’abord un avocat, un confrère agréable avec lequel il n’y avait pas de conflit possible, capable de médiation avant l’heure et incontestablement pointilleux. Après un bref passage dans le monde du commerce, il reviendra dans le monde judiciaire au Parquet puis au tribunal de police. Faisant preuve d’empathie vis-à-vis des victimes, il n’hésitait pas à faire la morale à celui qui était poursuivi, pour ne plus avoir à le juger pour la même cause, mettant en évidence les dommages parfois importants que celui-ci, par son inconséquence, aurait pu provoquer chez la victime. Dans le privé, c’était un homme de passions, nombreuses, éclectiques et variées qu’il vivait avec délectation.*
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Maître Hugues HIERNAUX, avocat au barreau de Namur, est décédé le 2 mars 2013. Il a prêté le serment d’avocat le 16 octobre 1990. Il commença son stage au barreau de Liège, chez Maître Bourgeois, pour le poursuivre ensuite dès avril 1992 au barreau de Namur chez Maître Marc Preumont. Il fut inscrit au Tableau de l’Ordre le 25 mars 1994. Pour Maître Hugues Hiernaux, la valeur n’a pas attendu le nombre des années. Il fit ses études à l’Université de Liège où ses qualités intellectuelles avaient déjà attiré l’attention de deux de ses professeurs, et non des moindres, les professeurs Franchimont et de Leval : ceux-ci le recommandèrent auprès du cabinet de Maître Marc Preumont afin qu’il y effectue son stage d’étudiant pour s’imprégner de la pratique judiciaire, stage qui révéla immédiatement son immense intérêt et passion pour la profession, avide déjà d’en connaître, sur le terrain, toutes les facettes et diverses complexités. Me Hugues Hiernaux, chacun l’aura compris, était un avocat sans concession, plaideur redouté et respecté. Ses clients lui vouaient une amitié et une reconnaissance que seuls les plus grands reçoivent. Celles-ci ne trouvaient pas leurs racines dans sa seule science du droit, et en particulier du droit pénal, mais aussi dans cette humanité et cette fraternité qu’il savait prodiguer à tous ceux qui lui avaient accordé leur confiance et qui lui avaient confié leur sort. Cette force et cet humanisme, Hugues les puisaient à n’en pas douter dans sa formidable énergie et son insatiable curiosité. Homme de grande culture, il aimait les voyages et les découvertes. Il aimait aussi faire partager à ses amis les bonheurs quelquefois rares et époustouflants d’une cave à vin d’exception, et d’une table où il offrait à chacun son temps et ses talents de cuisinier, eux aussi d’exception. C’est cet amour de la vie, entier et sans partage, que l’on retiendra avant tout de lui, amour à l’excès parfois, et tout son charme n’était-il pas dans cet excès ? A ses enfants, ses filles, Valentine et Charlotte, il vouait tous ses engagements, et il donnait sans compter l’amour d’un père et le dévouement absolu que seules les plus hautes exigences morales guidaient, pour lui mais aussi pour elles. De cet homme, tous auraient voulu être l’ami. A ses enfants, à son épouse et à ses proches, nous voulons témoigner ici au nom des barreaux du ressort, de l’estime et de l’amitié que chacun portait à Maître Hugues Hiernaux et de la solidarité du barreau à leur égard.*
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Que chacun de leurs proches sache le souvenir que nous leur portons et la mémoire que nous en entretenons. Je vous remercie de votre attention. André Renette, Bâtonnier de l'Ordre