Le licenciement avec préavis
Me Michel Strongylos, avocat au barreau de Liège
Chaque partie a le droit de résilier un contrat de travail à durée indéterminée ou déterminée, en notifiant un préavis à l’autre partie (article 37, loi du 3 juillet 1978 relative au contrat de travail).
- La forme du congé moyennant préavis
A peine de nullité relative (qui peut être dans certains cas couverte par le destinataire du congé régulier), l’employeur qui notifie le congé moyennant préavis doit utiliser les formules suivantes :
- Par recommandé à la poste ; dans ce cas, la notification est censée avoir lieu le 3e jour ouvrable qui suit la date de l’expédition de la lettre.
- Par exploit d’huissier, qui sort ses effets dès le jour de sa signification.
- La durée du préavis
La loi instaurant le « statut unique ouvrier-employé » prévoit, à partir du 1er janvier 2014, un nouveau délai de préavis identique pour les ouvriers et les employés. Le calcul du préavis s’effectue de la manière suivante :
- Le point de départ du délai
Le préavis commence à courir le lundi suivant la semaine au cours de laquelle le congé moyennant préavis a été notifié.
En conséquence, lorsque le congé est notifié par voie recommandée à la poste, le courrier doit être adressé au plus tard le mercredi pour que le préavis prenne cours le lundi suivant.
En cas de notification par voie d’huissier, le délai de préavis commence à courir le même jour, de telle manière que le congé peut être notifié le lundi pour pendre cours immédiatement.
- La notion d’ancienneté contractuelle
La durée du préavis dépende de l’ancienneté du travailleur ; celle-ci est définie au regard de la période pendant laquelle le travailleur est demeuré sans interruption au service de la même entreprise. La notion d’entreprise est définie par rapport à l’unité technique d’exploitation, sans égard à la modification éventuelle de sa nature juridique.
Par ailleurs, l’ancienneté inclut les périodes d’occupation du travailleur en qualité d’intérimaire auprès de l’employeur, à concurrence d’une année maximum.
- La durée du préavis dans le cadre d’un contrat conclu à partir du 1er janvier 2014
Les dispositions nouvelles en matière de préavis sont applicables de manière indistincte aux ouvriers et employés dont le contrat a débuté après le 1er janvier 2014.
Il existe certaines dérogations à cette durée de préavis uniforme, liées par exemple à l’âge de la pension (durée du préavis réduit à 26 semaines), aux ouvriers de certaines commissions paritaires.
Le délai de préavis uniforme s’établit de la manière suivante :
Ancienneté |
Délai de préavis |
0 à moins de 3 mois |
2 semaines |
3 à moins de 6 mois |
4 semaines |
6 à moins de 9 mois |
6 semaines |
9 à moins de 12 mois |
7 semaines |
12 à moins de 15 mois |
8 semaines |
15 à moins de 18 mois |
9 semaines |
18 à moins de 21 mois |
10 semaines |
21 à moins de 24 mois |
11 semaines |
2 à moins de 3 ans |
12 semaines |
3 à moins de 4 ans |
13 semaines |
4 à moins de 5 ans |
15 semaines |
5 ans à moins de 20 ans |
+ 3 semaines par année d’ancienneté supplémentaire (jusqu’à 60 semaines) |
20 ans à moins de 21 ans |
62 semaines |
A partir de 21 ans |
+ 1 semaine par année d’ancienneté supplémentaire |
- La durée du préavis dans le cadre d’un contrat conclu avant le 1er janvier 2014
En cas de contrat entré en vigueur avant le 1er janvier 2014, et dont le congé est notifié après cette date, la détermination du délai de préavis s’opère en trois étapes distinctes :
- Calcul du préavis par référence à l’ancienneté acquise au 31 décembre 2013
Le premier délai de préavis est calculé sur la base de l’ancienneté acquise depuis l’entrée en vigueur du contrat jusqu’au 31 décembre 2013.
Il s’agit du délai qui aurait dû être observé à cette dernière date compte tenu des « règles légales, réglementaires et conventionnelles en vigueur au 31 décembre 2013 ».
En ce qui concerne le personnel ouvrier, il y a lieu de tenir compte des délais fixés sur la base de l’article 61 ancien de la loi sur le contrat de travail ainsi que des délais fixés au sein de certaines conventions collectives de travail, dont la CCT n° 75.
En ce qui concerne les employés :
- Pour les employés dont la rémunération annuelle était inférieure à 32.254,00 EUR brut au 31 décembre 2013, la durée de préavis est de 3 mois par période de 5 ans entamée.
- Pour les employés dont la rémunération annuelle dépassait au 31 décembre 2013 32.254,00 EUR brut, le délai de préavis est équivalent à un mois par année d’ancienneté entamée, avec un minimum de 3 mois.
- Pour les employés dont la rémunération annuelle brute dépassait au 31 décembre 2013 64.508,00 EUR brut, il conviendra de déterminer si le contrat prévoit une clause sur la durée du préavis, qui ne pouvait être inférieur à 3 mois par période entamée d’ancienneté de 5 ans.
- Calcul du préavis par référence à l’ancienneté postérieure au 1er janvier 2014
Les délais sont calculés sur la base de la nouvelle loi (v. supra).
- La durée du préavis totale
L’addition des deux délais de préavis donne la durée totale du préavis à observer.
- L’indemnité compensatoire de licenciement et l’allocation de licenciement
Il est accordé au travailleur ouvrier dont le contrat de travail a pris cours avant le 1er janvier 2014, un préavis d’une durée identique à celui que l’ouvrier aurait obtenu si l’intégralité de son ancienneté avait été prise en compte pour fixer la durée du préavis en fonction des nouvelles dispositions. Cette indemnité dite « compensatoire de licenciement » est payée par l’ONEM et non par l’employeur.
Par ailleurs, l’allocation de licenciement qui avait été instaurée par la loi du 12 avril 2011 est maintenue.
- La rupture des contrats à durée déterminée ou pour un travail nettement défini
En cas de licenciement avec préavis dans la première moitié du contrat à durée déterminée ou pour un travail nettement défini (avec un maximum de 6 mois), le contrat peut être rompu moyennant le préavis ou l’indemnité compensatoire applicable en cas de contrat à durée déterminée.
En cas de licenciement après cette période, l’employeur sera redevable d’une indemnité égale à la rémunération restant à échoir jusqu’au terme du contrat, sans que ce montant puisse dépasser le double de la rémunération correspondant à la durée du délai de préavis qui aurait dû être respecté si le contrat avait été conclu sans durée déterminée.
- La suspension du préavis
La durée du préavis est suspendue et prolongée pour les raisons prévues par la loi, notamment en cas d’incapacité de travail et/ou de vacances annuelles.
- Contre-préavis
Le travailleur qui a retrouvé un emploi peut à son tour résilier le contrat moyennant remise d’un préavis réduit, dont la durée est fonction de son ancienneté au sein de l’entreprise.
Mai 2017