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Application de la directive Mifid au secteur de l’assurance
Maître Thomas Dubuission, avocat
La directive 2004/39/CE, dite directive MIFID (Market in Financial Instruments Directive ou Directive sur les marchés d’instruments financiers), impose aux entreprises actives sur les marchés financiers une série d’obligations d’information à l’égard de leurs clients. Cette directive a été transposée en droit belge par l’arrêté royal du 27 avril 2007.
Initialement, le secteur de l’assurance n’était visé ni par la directive, ni par l’arrêté en assurant la transposition. Toutefois, constatant que certains produits d’assurances étaient assimilables à des produits financiers (surtout dans le domaine des assurances de personnes), le législateur a procédé à la « mifidisation » de l’assurance dans le cadre d’une réforme baptisée Twin Peaks II.
Depuis cette réforme, entrée en vigueur le 30 avril 2014, les assureurs et intermédiaires d’assurance sont également tenus par des obligations spécifiques d’information à l’égard de leurs clients.
1. Champ d’application ratione materiae ?
Les multiples informations précontractuelles à transmettre par l’assureur ou l’intermédiaire au client peuvent être regroupées en trois catégories. Premièrement, les informations relatives au prestataire du service : son nom, son numéro de BCE, les langues que le client peut utiliser lorsqu’il prend contact avec lui, les modes de communication à utiliser, …
Deuxièmement, les informations quant au type de contrat proposé : les types de contrats que le prestataire peut proposer, l’étendue des couvertures offertes par ces contrats,…
Troisièmement, les informations à propos des coûts et frais liés au contrat et qui peuvent être supportés par le client.
2. Champ d’application de la réforme
Eu égard aux motifs présidant à l’adoption de la réforme, il pouvait raisonnablement être supposé que seuls les assureurs et intermédiaires d’assurance proposant des produits similaires à des produits financiers seraient soumis aux nouvelles obligations d’information. Il n’en est toutefois rien.
En effet, la réglementation nouvelle instaure un mécanisme d’information du client à deux vitesses.
Ainsi, certaines informations devront être transmises au client quel que soit le produit d’assurance visé, tandis que certaines autres ne devront être transmises que s’il s’agit d’une assurance d’épargne et/ou d’investissement.
A titre d’exemple :
- Il appartiendra aux entreprises d’assurance ainsi qu’aux intermédiaires, en toutes hypothèses, d’informer leurs clients au moyen d’une « description générale, éventuellement fournie sous une forme résumée, de la politique suivie par le prestataire de services en matière de conflits d’intérêts pouvant surgir entre le client et le prestataire de services ou d’autres clients » (art. 8 de l’arrêté royal n°2) ;
- Par contre, si le produit d’assurance est un produit d’épargne et/ou de pension, les assureurs et intermédiaires devront en outre informer leurs clients des risques afférents à ces produits (art. 4 de l’arrêté royal n°1);
Pour le surplus, il convient de préciser que les entreprises de réassurance et les intermédiaires de réassurance ne sont pas visés par la réforme et échappent donc aux nouvelles obligations prévues par celle-ci.
3. Le mystery shopping : un nouveau moyen d’investigation entre les mains de la FSMA
La FSMA, chargée du respect des obligations d’information, dispose, depuis la réforme, d’un nouveau moyen pour déceler les manquements aux obligations précitées.
Ce moyen est appelé le « mystery shopping ».
Concrètement, la FSMA est en droit de mandater des membres de son personnel ou des tiers, afin que ceux-ci se fassent passer pour des clients auprès des prestataires de services visés par la réforme, et puissent, de la sorte, vérifier le respect par ceux-ci de leurs obligations.
4. Sanction en cas de méconnaissance des obligations d’information
Une question demeure : comment sanctionner les prestataires de services qui ne respectent pas leurs obligations d’information ?
Sous l’ancien régime, en cas de manquement par les assureurs ou intermédiaires à leurs obligations d’information, outre la sanction de droit commun de la responsabilité, une action en cessation était envisageable. Une mesure d’injonction pouvait également être prise par la FSMA, laquelle mesure était susceptible d’aboutir à des amendes administratives en cas de non-respect de celle-ci. La réforme a créé une nouvelle sanction civile en insérant un article 30 ter dans la loi de contrôle du 2 aout 2002.
En application de cette disposition légale, si le prestataire de services a méconnu son obligation d’information, la souscription du contrat est présumée, sauf preuve contraire, résulter de la fourniture de l’information inexacte ou incomplète.