Evolutions récentes du tax shelter pour financer les entreprises débutantes

Maître Luc Herve, avocat au barreau de Liège

Il est souvent malaisé, pour une très jeune entreprise, d'accéder aux capitaux ou aux prêts. Le tax shelter vise à remédier à ces difficultés de financement. Cet intéressant avantage fiscal, introduit en 2015, a donné lieu à divers aménagements qui retiendront ici notre attention.

1.-       La loi-programme du 10 août 2015 a introduit diverses mesures visant à favoriser le financement des nouvelles (petites) entreprises. Parmi les plus intéressantes, on pointe le tax shelter pour les entreprises qui débutent, lequel consiste en une réduction d’impôt accordée, sous certaines conditions, aux personnes physiques qui souscrivent à de nouvelles actions ou parts émises par une PME qui débute, ou à des parts d’un fonds starter agréé qui investit à son tour les fonds ainsi collectés dans de nouvelles actions ou parts émises par des PME débutantes.

Les actions ou parts nouvellement émises doivent être souscrites à l'occasion de la constitution de la société débutante ou d'une augmentation de capital intervenant dans les quatre ans de sa constitution. L'avantage fiscal peut, au maximum, s'élever à 45.000,00 EUR par an. L'objectif poursuivi est de combler le déficit de financement dont sont victimes les entreprises qui débutent et de favoriser l'investissement dans les activités économiques réelles.

L'octroi de cet avantage fiscal est soumis à des conditions nombreuses et strictes. En 2016, celles-ci ont fait l’objet d'adaptations et ajouts.

Quelles conditions ?

2.-       Pour bénéficier du tax shelter, le contribuable doit prouver que les actions ou parts des sociétés auxquelles il a souscrit répondent aux conditions pour pouvoir bénéficier de la réduction d’impôt et qu’il a acquis ces actions, parts ou parts de fonds starters agréés pendant la période imposable durant laquelle il postule l’octroi de la réduction. En outre, pour que la réduction soit entièrement maintenue, le contribuable doit également prouver, chaque année pendant quatre ans, qu’il est encore en possession de ces parts ou actions.

Un arrêté royal du 1er avril 2016 règle la manière dont le contribuable doit rapporter ces preuves.

Ainsi, les sociétés éligibles doivent établir annuellement, avant le 31 mars de l'année qui suit celle de l'année d'acquisition des actions ou parts entièrement libérées, et des quatre années suivantes, un document qui :

1°     pour l'année d'acquisition :


a) reprend les sommes donnant droit à la réduction ;
b) certifie que la société remplit ou non les conditions (conditions d'éligibilité des sociétés) ;
c) reprend le taux de la réduction (30 % ou 45 % s’il s’agit d’une microsociété) ;



2°     pour chacune des quatre années suivantes :


certifie le cas échéant que ces actions ou parts sont toujours en possession du souscripteur au 31 décembre de la période imposable, et qu’il est encore satisfait aux conditions d’éligibilité devant être remplies par la société au cours des 48 mois suivant la libération des actions de la société;



3°     pour l'année de la cession des actions ou parts :


reprend le nombre de mois non encore expiré(s) à prendre en considération pour le calcul de la reprise de réduction.

 

En septembre 2016, l’administration a rendu un avis dans lequel elle présente un modèle non-obligatoire d’attestation.

Quid du crowdfunding ?

3.-       Une loi du 18 décembre 2016 a instauré un régime organisant la reconnaissance et l’encadrement du crowdfunding, lequel faisait défaut.

En l’espèce, la loi vise le type de plateformes de crowdfunding où le public investit dans une entreprise, soit via un prêt, soit via un apport en capital dans la perspective de percevoir des bénéfices éventuels. Cette réglementation présente également de l'intérêt au regard de l’exonération fiscale des intérêts des prêts accordés à une PME dont l’octroi est conditionné à l’intervention d’une plateforme de crowdfunding agréée.

La loi du 18 décembre 2016 a aussi apporté des adaptations au régime du tax shelter pour les PME.

Elle élargit et diversifie les formes de placements qui peuvent être utilisés pour bénéficier de l'avantage fiscal. En effet, il est désormais admis, à certaines conditions, d'affecter des sommes à l’acquisition de nouveaux instruments de placement émis par un véhicule de financement visé par la loi du 18 décembre 2016 ou encore de souscrire à une fraction du capital social d’un fonds starter public ou d’une pricaf privée starter.

Par ailleurs, les émetteurs de certificats d’actions sont désormais considérés comme des véhicules de financement, ce qui implique concrètement que pour bénéficier du tax shelter, les certificats d’actions devront être acquis par l’intermédiaire d’une plateforme de crowdfunding.

Enfin, l’exclusion des quasi-apports au sens du Code des sociétés est désormais expressément prévue dans la loi.

On notera qu'en ce qui concerne l’exonération des intérêts des prêts accordés à des PME, le bénéfice de cet avantage est désormais réservé aux prêts accordés aux sociétés alors qu’auparavant, les prêts accordés à des entrepreneurs personnes physiques pouvaient aussi être pris en compte. Il est possible de bénéficier de cet avantage en souscrivant à des instruments de placement émis par un véhicule de financement. Dans ce cas, l’intervention d’une plateforme de crowdfunding reste requise.

Les dispositions de la loi du 18 décembre 2016 entrent en vigueur à partir de l’exercice d’imposition 2017. Néanmoins, les dispositions relatives à l’encadrement des plateformes de crowdfunding et donc à leur agrément, ne sont applicables qu’à partir du 1er février 2017.


 

Ces adaptations et ajouts s'avéraient nécessaires afin de permettre au réel avantage fiscal que constitue le tax shelter pour entreprises débutantes de déployer tous les effets initialement voulus par le législateur.