Conditions générales : quel taux d’intérêt de retard et quelle clause pénale prévoir ?

Maître Virginie Bloom, avocate

Outre les mentions obligatoires qui doivent se retrouver sur une facture, il est utile de voir figurer au verso de celle-ci des conditions générales de vente ou de prestations de services qui viennent modaliser les règles de droit commun supplétives (c’est-à-dire celles auxquelles on peut déroger). Le contrat commercial étant le fondement même de l'activité de l'entreprise, le dirigeant d'entreprise devra veiller à la qualité de la rédaction de ses contrats et des conditions générales qu’il souhaite voir figurer.

Pour ce faire, il est prudent de s’entourer des conseils d'un avocat à qui il confiera ses besoins, les spécificités de son entreprise et de son marché, afin de pouvoir disposer de contrats répondant parfaitement à ses exigences, sécurisant le cadre de son exécution et prévenant les cas d'inexécution. La rédaction du contrat va en effet figer les obligations des parties dans la mesure où, sauf dispositions d'ordre public contraires, le contrat devient « la loi des parties ».

La qualité de la rédaction du contrat revêt par conséquent une importance toute particulière. En cas de litige, et pour autant que les conditions visées ci-dessous soient remplies, le juge se réfèrera aux stipulations contractuelles, dès lors que celles-ci sont claires, non équivoques et non excessives.

La force probante d’une facture ne concerne donc pas exclusivement l’existence de la convention en tant que telle, mais intervient également lorsque se pose la question de l’application des conditions générales mentionnées sur la facture.

Si le client est commerçant :

en vertu de l’article 25 du code de commerce, la facture acceptée (expressément, implicitement ou tacitement, c’est-à-dire si elle est ne fait pas l’objet de contestation dans un délai raisonnable) fournit la preuve de l’existence du contrat ; cette force probante s’étend en principe à toutes les dispositions de la facture et aux conditions générales qui y sont apposées.

Exceptions (l’acceptation tacite de la facture ne vaut pas acceptation des conditions générales lorsque) :

  1. les conditions reprises sur la facture sont différentes ou plus strictes de celles reprises dans le contrat, ou s’il existe des contradictions avec celles reprises sur le bon de commande ;
  2. dans la correspondance du destinataire, il a toujours été fait référence à ses propres conditions générales ;
  3. la facture ne reprend pas les conditions générales mais se limite à renvoyer à leur existence (par exemple au site internet de la société ou à celui du Moniteur belge si elles y ont été publiées) ;
  4. la présentation graphique des conditions générales est trompeuse (petits caractères, place anormale,…) ;
  5. la facture est établie dans une langue que la destinataire ne maîtrise pas ;
  6. la facture contient des clauses inhabituelles ou excessives (ex. : clause déclarant un tribunal étranger compétent).

Si le client n’est pas commerçant :

Le fournisseur qui veut se prévaloir des conditions générales reprises sur sa facture devra prouver que le client en avait eu connaissance et qu’il les avait acceptées (ce sera le cas notamment s’il peut produire un contrat écrit, signé par les parties, dans lequel les conditions générales étaient déjà intégrées). A contrario, si elles figurent uniquement sur la facture, il est généralement admis qu’elles ne sont pas opposables au client non commerçant.

Parmi ces conditions figurent souvent des clauses visant l'allocation d'intérêts de retard en cas de retard de paiement du prix de la transaction et/ou l'application d'une pénalité via une clause pénale.

Intérêts de retard :

En principe, des intérêts sont dus à l'échéance de la facture si un terme a été convenu (art. 1134 du Code civil) ou à dater de la mise en demeure (art. 1153 du Code civil).

Les intérêts sont dus au taux légal en matière civile ou dans le cadre de transactions entre un commerçant et un particulier (en 2011 : 3,75 % ; en 2012 : 4,25% ; en 2013 : 2,75% ; en 2014 : 2,75 % ; en 2015 : 2,5 %) ou au taux conventionnel (fixé par les parties) - (art. 1907 du Code civil).

La loi du 2 août 2002, quant à elle, ne s'applique qu'aux transactions commerciales. Elle prévoit que dans ce type de transactions, le délai de paiement (à défaut d'une convention) est de 30 jours à dater du lendemain de la réception de la facture, ou de la réception de la marchandise ou du service, ou de l'agréation de la marchandise ou du service. Si le débiteur ne paie pas dans le délai convenu ou, à défaut de convention, dans le délai de 30 jours en question, le créancier a droit, de plein droit et sans mise en demeure, à des intérêts de retard au taux légal applicable en cas de retard de paiement dans les transactions commerciales publié au Moniteur par le Ministre des finances (en 2012 : 8%, en 2013 : 9%, en 2014 : 8,5 %, en 2015 8,5% - pour les contrats conclus, renouvelés ou prorogés après le 16 mars 2013), à défaut d’un taux conventionnel spécifié.

Néanmoins, même si un taux conventionnel a été prévu, le juge peut réduire l'intérêt stipulé à un taux qu'il estime « raisonnable » (actuellement 10 % devant les juridictions liégeoises), si cet intérêt excède manifestement le dommage subi à la suite du retard (art. 1153 du Code civil + Code de droit économique).

Clauses pénales :

Les clauses pénales ont pour objet de fixer, à l’avance, le montant de l’indemnité forfaitaire à laquelle le créancier aura droit si son débiteur venait à manquer à ses obligations. Elles s’appliquent en cas d’inexécution fautive du contrat. Le juge peut les réduire si elles sont excessives.

La Cour d'Appel de Liège a rendu plusieurs arrêts précisant le montant raisonnable lorsqu'une clause pénale est prévue dans les conditions générales. Elle applique différents pourcentages selon les montants en cause (par dossier) :

  • jusqu'à 4.000 € : 10 %
  • de 4.000 € à 12.500 € : 7, 5 %
  • de 12.500 € à 25.000 € : 5 %
  • de 25.000 € à 50.000 € : 2,5 %
  • à partir de 50.000 € : 1, 5 %

Le tribunal de commerce de Liège applique, en cas de contestation ou de défaut, une jurisprudence identique. En dessous de 400 €, un montant forfaitaire de 40 € est souvent admis.