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L’offre conjointe en matière de services financiers
L’Union européenne permet exceptionnellement aux Etats membres de maintenir dans leur législation nationale des dispositions plus strictes que ce que prévoit la directive d’harmonisation des pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs, dans certains secteurs particulièrement sensibles : l’immobilier et les services financiers « eu égard à leur complexité et aux graves risques qui leur sont propres. »
Concrètement, qu’est-ce qui est interdit ?
Le législateur belge a profité de cette dérogation pour interdire toute offre conjointe au consommateur dont au moins un des éléments constitue un « service financier », c’est-à-dire tout service ayant trait à la banque, au crédit, à l'assurance, aux retraites individuelles, aux investissements et aux paiements.
Sont donc en principe interdites d’après la loi belge sur les pratiques du marché :
- les offres conjointes portant sur plusieurs services financiers (par exemple, l’ouverture d’un compte épargne sans frais lors de la conclusion d’un contrat d’assurances);
- les offres conjointes dont l’un des éléments seulement constitue un service financier (par exemple, l’offre de 6 mois d’assurance omnium à l’achat d’un véhicule). Le 18 juillet 2013, dans une affaire CITROËN, la Cour de justice a confirmé que l’interdiction des offres conjointes dont un seul élément constitue un service financier est compatible avec le droit européen, et ce que le service financier constitue l’élément principal ou accessoire de l’offre.
Quelques précisions et exceptions…
- L’interdiction ne vise pas seulement les cas où un produit ou service est offert gratuitement à l’achat d’un autre produit ou service, mais plus généralement tout avantage proposé au consommateur (par exemple, un crédit à taux réduit).
- L’interdiction s’applique aux services financiers, mais pas aux produits financiers (tels que les actions, obligations, options, swaps, …). Mais attention : dès que l’offre se compose d’au moins un service financier, par exemple un service bancaire, elle risque d’être interdite (par exemple, permettre à un client de bénéficier d’un compte à terme avec un taux de rendement avantageux en investissant dans certains instruments financiers, tels que des SICAV).
- Il n’y a pas « offre » au sens de la loi, lorsque l’avantage résulte d’une négociation individuelle entre l’entreprise et le consommateur; pour entrer dans le champ de l’interdiction, il faut que l’offre revête une certaine publicité.
- L’interdiction connaît certaines exceptions, mais leurs critères sont assez difficiles à appliquer.
L’offre peut ainsi être autorisée lorsque les deux éléments de l’offre sont des services financiers qui constituent un ensemble. Par exemple, l’offre d’une assurance protection juridique gratuite pendant un an à la souscription d’une assurance RC automobile ont été jugées valables en instance comme constituant un ensemble, tandis que la Cour d’appel a été d’un avis contraire.
La loi permet également d’offrir des services financiers « et des menus biens et menus services admis par les usages commerciaux », mais la même difficulté d’application est constatée. Dans une affaire jugée, une banque proposait une assurance automobile et, conjointement, l’accès gratuit à un programme homebanking. Le président du tribunal de commerce avait jugé que cet accès pouvait être considéré comme un menu service, mais la Cour d’appel a été d’un autre avis, jugeant qu’une telle combinaison n’avait du reste rien d’usuel.
Conclusion :
Attention donc aux offres conjointes en matière de services financiers : l’interdiction reste le principe, l’autorisation l’exception !