L’expropriation en bref : conditions et procédure

Maître Marie Vanderheyden, avocate au barreau de Liège

 

 

L’expropriation vise à priver le propriétaire d’un bien immobilier de son droit de propriété, contre son gré. Le pouvoir expropriant est, en règle, un pouvoir public – par exemple, la Région wallonne ou une commune.

L’expropriation ne peut avoir lieu qu’à trois conditions :

  1. la légalité de l’expropriation : l’hypothèse précise d’expropriation et le pouvoir d’exproprier de l’autorité expropriante doivent être prévus par la loi ;

     
  2. l’utilité publique de l’expropriation : par exemple, la construction d’une route, la protection d’un monument classé, la rénovation d’un quartier désaffecté ou encore la construction de logements sociaux ;

     
  3. une indemnité juste et préalable pour l’exproprié : l’indemnité de principe doit être équivalente à la somme à débourser pour se procurer un bien de même valeur que le bien exproprié. A certaines conditions, des indemnités complémentaires peuvent être octroyées.

La procédure d’expropriation comprend trois étapes :

  1. dans un premier temps, une enquête administrative portant sur le projet qui justifie l’expropriation est organisée. Elle permet notamment aux personnes opposées au projet de déposer des réclamations auprès de l’autorité compétente. Après la clôture de l’enquête, un arrêté d’expropriation est adopté. Cet arrêté justifie l’utilité publique et l’urgence de l’expropriation ;

     
  2.  ensuite, le pouvoir expropriant négocie avec les futurs expropriés, en vue de fixer le prix d’achat des biens concernés ainsi que l’indemnité d’expropriation. Dans 95% des cas, la procédure prend fin par cette négociation amiable ;

     
  3. si les parties n’arrivent pas à trouver un terrain d’entente, une phase judiciaire s’ouvre devant le juge de paix. Cette phase judiciaire se subdivise elle-même en deux étapes :
  • une première étape, traitée en extrême urgence, vise à déterminer si l’expropriation est légale et, dans l’affirmative, à permettre à l’autorité de prendre rapidement possession des lieux. Lors d’une visite des lieux en présence du juge et d’un expert, les propriétaires concernés peuvent faire valoir toutes leurs critiques sur l’expropriation. Le juge rend ensuite un jugement qui contient une première évaluation de l’indemnité d’expropriation. Le montant fixé par le juge ne peut pas être inférieur à 90% de l’offre amiable faite par le pouvoir expropriant. Aucun recours n’est ouvert contre ce jugement pour les expropriés ;

 

  • une seconde étape, traitée sans extrême urgence, a pour but principal d’affiner l’estimation relative à l’indemnité d’expropriation. Après le dépôt d’un rapport d’expertise et la tenue d’une audience de plaidoiries, le juge de paix adopte un jugement fixant le montant définitif de l’indemnité d’expropriation. Les expropriés peuvent alors introduire une action en révision devant le tribunal de première instance contre ce jugement, soit pour contester la légalité de l’expropriation, soit pour contester le montant de l’indemnité.

Notre conseil : si vous recevez un courrier par lequel un pouvoir public vous propose d’acquérir votre bien à l’amiable pour un projet d’utilité publique ou si vous êtes menacés d’expropriation, il est préférable de faire appel à un avocat pour défendre au mieux vos intérêts dans le cadre de la négociation amiable, voire de la procédure judiciaire.