La loi sur les gages et le registre des gages

Maître François Ligot, avocat au barreau de Liège

L’objectif poursuivi par cette nouvelle législation consiste à moderniser le droit des sûretés par l’instauration d’un mécanisme de gage sans dépossession et par la création d’un registre national des gages.

Gage sans dépossession

La loi sur les gages introduit un gage sans dépossession sur les biens mobiliers, ce qui signifie concrètement que  désormais, un débiteur peut mettre un bien mobilier en gage, sans s’en déposséder et peut dès lors continuer à l’utiliser.  

Cette modification constitue une révolution par rapport à l’ancien régime qui prévoyait que le gage impliquait une dépossession de l’objet constituant l’assiette de la sûreté. Auparavant, le bien donné en gage ne pouvait plus être utilisé par son propriétaire, ce qui constituait un inconvénient majeur.

Registre national des Gages : une application accessible à tous

 

Le Registre national des Gages qui permet l’enregistrement des gages et des réserves de propriété a été créé en vue d’assurer l’opposabilité aux tiers du contrat de gage.

Le Registre national des Gages, appelé registre des gages, est en réalité une application web accessible à tous qui fonctionne de manière totalement autonome. Cela signifie que le créancier gagiste ou le vendeur lui-même peut enregistrer directement dans le registre son gage ou sa réserve de propriété, sans intervention de quiconque,  et gérer cet enregistrement de manière autonome.  

Le registre des gages relève de la Direction de l’Administration générale de la Documentation patrimoniale du SPF Finances, qui a publié le 23 novembre 2017 une circulaire expliquant la législation sur le gage.

Le site officiel du registre des gages est https://pangafin.belgium.be et le registre des gages peut être contacté à l'adresse Click here to show mail address

Enregistrement de données dans le registre

 

Pratiquement, l’utilisateur du registre des gages n’a accès à ce registre qu’après s’être identifié et authentifié au moyen de sa carte d’identité et de son code (les créanciers gagistes étrangers devront donc nécessairement faire appel à un intermédiaire belge pour réaliser un enregistrement).

Une fois identifié, il appartient au créancier gagiste de procéder à l’enregistrement de son gage par l’introduction dans le registre des données visées par la loi, soit :

  1. l’identité du créancier gagiste ou du représentant agissant pour le compte d’un ou de plusieurs bénéficiaires;
     
  2. l’identité du constituant du gage;
     
  3. le cas échéant, l’identité du mandataire du créancier gagiste ou du représentant;
     
  4. la désignation des biens grevés du gage faisant l’objet de l’enregistrement;
     
  5. la désignation des créances garanties faisant l’objet de l’enregistrement;
     
  6. le montant maximal à concurrence duquel les créances sont garanties et qui fait l’objet de l’enregistrement;
     
  7. la déclaration du créancier gagiste, du représentant ou de son mandataire selon laquelle le créancier ou lereprésentant est responsable de tout dommage qui résulterait de l’inscription de données erronées.

Le bien grevé faisant l’objet de l’enregistrement doit être identifié avec une précision suffisante, car en plus de l’identité du constituant du gage, sa désignation  peut être utilisée dans le cadre d’une recherche en cas de consultation du registre des gages.

Outre l’enregistrement à proprement parler d’un gage ou d’une réserve de propriété, le registre des gages offre la possibilité de renouveler, modifier, radier le gage enregistré ou la réserve de propriété enregistrée, de céder ou (seulement pour le gage) de réaliser une cession de rang.

Toutes les transactions effectuées dans le registre des gages sont conservées dans l’ordre chronologique.

 

Après confirmation des données introduites, l’utilisateur (créancier gagiste, vendeur sous réserve de propriété, représentant, mandataire) est renvoyé vers un écran spécifique pour le paiement de la redevance due.

L’utilisateur non enregistré devra exécuter un simple paiement en ligne par le biais du module de paiement électronique sécurisé WorldLine  tandis que l’utilisateur enregistré  devra payer par le biais de son compte provision.

Une fois le paiement exécuté, l’utilisateur reçoit un numéro d’identification unique qui lui permettra de modifier, renouveler, radier l’enregistrement, de le céder ou (uniquement dans le cas du gage) de réaliser une cession de rang. En guise de confirmation, un document digital (pdf) est délivré, mentionnant toutes les données de l’enregistrement, dont l’intégrité est garantie par une signature électronique.

Consultation du registre des gages

 

La loi prévoit que toute personne a accès au registre des gages selon les modalités fixées par le Roi.

Un certain nombre de limites ont été fixées afin de freiner la consultation illimitée du registre des gages. Ainsi, chaque consultation requiert le paiement préalable d’une redevance et l’identité de la personne qui consulte est enregistrée dans le système de manière à conserver une trace de toutes les recherches effectuées durant les six derniers mois.

En outre, toute utilisation du registre des gages à des fins de prospection commerciale ou de commercialisation de listings sur la situation financière des personnes est interdite.

Combien cela coûte-t-il ?

Pour chaque utilisation du registre des gages, une redevance est due dont le tarif varie en fonction de l’opération réalisée, du montant des créances garanties ou du prix de vente du bien meuble vendu sous réserve de propriété.

Les redevances sont les suivantes :

  • de 20 à 500 € pour l’enregistrement d’un gage ou d’une réserve de propriété ou leur renouvellement;
     
  • de 12 à 300 € pour la modification de l’enregistrement d’un gage ou d’une réserve de propriété;
     
  • de 8  à 200 € pour la radiation totale de l’enregistrement d’un droit de gage ou d’une réserve de propriété ;
     
  • 10 € pour la cession de rang d’un gage ou la cession d’une réserve de propriété.

La simple consultation du registre des gages requiert également le paiement d’une redevance de 5 € qui entraîne l’émission d’un document signé électroniquement dans lequel est mentionné soit un résultat de recherche négatif, soit l’existence d’un gage ou d’une réserve de propriété.

 

 

Validité

 

L’enregistrement d’un gage expire après une période de 10 ans, mais ce délai peut être renouvelé pour des périodes successives de 10 ans, étant précisé que le renouvellement doit avoir lieu avant l’écoulement du délai. L’absence de renouvellement dans les délais entraine l’expiration de l’enregistrement avec toutes les conséquences fâcheuses qui en résultent: coûts d’un nouvel enregistrement, perte de rang,…

En cas de paiement de la dette garantie, il appartient au créancier gagiste, son représentant ou son mandataire de veiller à la radiation de l’enregistrement. A défaut, la radiation doit être demandée en justice par le constituant du gage, sans préjudice d’éventuels dommages et intérêts.

Après plus d’un an d’existence, il semble que la loi sur les gages soit en passe d’atteindre son objectif visant à offrir une plus grande flexibilité dans le recours aux sûretés mobilières tout en garantissant la sécurité juridique indispensable à un tel mécanisme.