La digitalisation des faillites est en marche

Maître François Minon, avocat au barreau de Liège

L’informatisation de la justice est bien en cours, et ce ne sont pas les curateurs qui vous diront le contraire… La loi du 1er décembre 2016[1], qui est entrée en vigueur le 1er avril 2017, a modifié le Code Judiciaire et la loi du 8 août 1997 sur les faillites en instituant le Registre Central de la Solvabilité, appelé « REGSOL ». REGSOL est la base de données informatique où le dossier de la faillite est enregistré et conservé : il contient toutes les données et pièces relatives à la procédure de chaque faillite.

Cette plateforme est gérée conjointement par l’Ordre des Barreaux Francophones et germanophones et l’Ordre van Vlaams Balies, qui en assurent le contrôle et le fonctionnement (dont la sécurisation des données). En d’autres mots, depuis le 1er avril 2017, tous les dossiers de faillite sont désormais digitalisés sur la plateforme REGSOL. Tous les acteurs de la faillite (tribunal, juge- commissaire, greffe, curateur, Parquet, créanciers, …) interviennent de manière numérique sur cette plateforme de telle sorte que le dossier papier est voué à disparaître.

L’utilisation de cette plateforme est rémunérée par une redevance annuelle à charge des faillites à titre de frais de justice.

Quels sont les changements pour les créanciers ?

1/ l’information

Désormais, pour savoir si un client ou fournisseur est en faillite, il suffit de consulter le site www.regsol.be et d’y introduire le nom de l’entreprise concernée dans l’index « cherchez la faillite ». Vous y trouverez également des informations telles que le nom du curateur, du juge-commissaire, …

2/  la déclaration de créance

Avant l’entrée en vigueur de la loi du 1er décembre 2016, pour pouvoir participer à une répartition, les créanciers d’une faillite devaient déposer la déclaration de leurs créances avec leurs pièces justificatives au greffe du Tribunal de Commerce dans le délai fixé par le jugement déclaratif de faillite. Ce dépôt s’effectuait généralement par envoi, le cas échéant avec recommandation postale pour des raisons probatoires.

La pratique acceptait également que les déclarations de créances soient adressées directement au curateur de la faillite.

Depuis le 1er avril 2017, les créanciers doivent en principe enregistrer la déclaration de leurs créances par voie électronique sur le site du registre central de solvabilité : www.regsol.be. Ils pourront s’enregistrer sur ce site sans envoi ni déplacement.

Qui est obligé de passer par la plateforme REGSOL ?

Tous les créanciers sauf les personnes physiques et les personnes morales établies à l’étranger, à moins qu’elles ne soient représentées par un conseil. Ces dernières ont le choix d’introduire leur déclaration de créance soit par voie numérique soit par écrit auprès du curateur.

Combien cela coûte ?

Chaque déclaration de créance sur REGSOL coûte 6 €, sauf pour les créanciers institutionnels (c’est gratuit) « eu égard à l’accomplissement de leur mission légale », précise la disposition.

En pratique, la déclaration se réalise par le site www.regsol.be  en cliquant sur le pavé «  introduire une déclaration de créance pour une faillite en Belgique ». Il faut ensuite s’enregistrer  et régler les droits avec les modes de paiement « on line » habituels.

3/ l’accès au dossier de la faillite

Jusqu’au 1er avril 2017, le greffe tenait un dossier pour chaque faillite, contenant le procès-verbal de descente de faillite, l’inventaire, les ordonnances écrites rendues par le juge-commissaire, les extraits de publications, les PV de vérification des créances, etc.

Tout intéressé -  dont les créanciers- pouvait prendre gratuitement connaissance du dossier, voire en obtenir copie moyennant paiement des droits de greffe.

Cette disposition a été aménagée en vue de permettre l’accès au dossier par le biais de la plateforme REGSOL : les créanciers pourront ainsi consulter un certain nombre de documents.

Il n’est dès lors plus nécessaire de se déplacer au greffe du Tribunal de Commerce de l’arrondissement du débiteur en faillite pour prendre connaissance des éléments procéduraux déterminants de la faillite. On ne peut que s’en réjouir.

Après quelques semaines de pratique et ses inévitables « premières maladies de jeunesse », le site REGSOL doit encore poursuivre son évolution et ses améliorations. Force est de constater qu’à l’heure du numérique, c’est un outil de gestion moderne, rapide et efficace, qui devrait faciliter et fluidifier les échanges entre tous les acteurs de la faillite. Reste encore à ces derniers à s’adapter à cette nouvelle réalité.

 

[1] Publiée au Moniteur Belge du 11 janvier 2017, p.1178 et suivantes.